Interviews de Benoît Blue Boy

et une de Patrick Verbeke

 

2007 believe.fr interview

2003 : Ceux d'ici - Une exclusivité Blues Magazine

 

 

Micro ouvert à BENOÎT BLUE BOY
Interview réalisée le 04 Mai 2002 à Castres au Bolégason.

Publiée ici : http://perso.wanadoo.fr/deltablues/page34.html

du site http://www.deltablues.fr.st/

 

+

 Interview de Benoît Blue Boy  par Xavier Delta Blues 
Descendre au Café en Amérique
(Gare ta Voiture Au Bout de Mon Lit)
date: 5 mai 2002      

http://gazettegreenwood.free.fr/an2002/n43/numero43.htm#bbb

2001 : Sur la route 66

1997 : bluesmagazine.net/A_Blues_magazine/n6.html

 

 

 

Lire dans l'interview de Patrick Verbeke le paragraphe

 sur la genèse du blues en français entre 79 et 81 :

http://perso.wanadoo.fr/deltablues/page46.html 

extrait du site http://www.deltablues.fr.st/ :

« Le Blues Français a une âme ». C'est sur le site Internet de Magic Blues. Quel est le regard de Patrick Verbeke sur toute cette génération de groupes de Blues en France ?? N'oublions pas de rappeler l'extrême qualité actuelle du Blues français !!!


Patrick Verbeke : Un regard admiratif et bienveillant ! Un peu surpris surtout !! On récolte ce que l'on a semé avec Benoît (Benoît Blue Boy) Paulo (Paul Personne) et Bill (Bill Deraime). Avant, c'était la variété avec Johnny, Dick Rivers, Eddy Mitchell, Nougaro ou encore Sanson et même Nicole Croisille, sous le nom de Tuesday Jackson, qui s'était emparée de quelques morceaux de Blues. Nous, notre répertoire était Exclusivement Blues ! Le premier a été Benoît en 79, et puis moi, pour ma part, j'avais commencé à écrire un album en Anglais, j'arrivais pas à passer au Français !!                          (suite colonne 2)

Et entre temps, Bill Deraime m'a piquée ma rythmique, attends, c'était trop drôle !, j'étais avec Milteau et Deschamps, on est allé faire un concert en Suisse, en première partie d'Albert Collins et de Johnny Winter, et c'est à la suite de ce concert qu'ils ont réalisé le premier album de Bill ! Sur le coup, j'étais pas très content, c'est vrai…

A l'époque, j'accompagnait Vince Taylor, sur la fin de sa vie, et finalement la genèse du Blues s'est faite comme ça, il y a eu le 1° album de Benoît, celui de Bill a peu près en même temps que le mien, et finalement, quand j'ai écouté Benoît, je me suis dit « Si lui, il arrive à chanter en Français, pourquoi je pourrais pas ?? » . Et puis, de 79 à 81, ce fut la révolution du Blues en France. Et celui qui enfoncé le clou, ça été Luther Allison, il me disait « Attends, le Français c'est ta langue maternelle, comment veux tu faire passer tes émotions si tu chantes dans une langue que les gens ne comprennent pas ?? » C'était l'argument « qui tue » !

 

 

 

et

ci -dessous, Benoît nous parle de ses 10 albums  :

˜DISCOGRAPHIE DE BENOÎT BLUE BOY˜

Interview aimablement transmise par  Serge Sciboz, de la revue Blues and co.

Parue en juillet et septembre 2001 - http://www.blues-n-co.org/

 

ordre chronologique : lire colonne 1, puis la 2 :

Difficile de ne pas avoir de respect pour Benoît Blue Boy en raison de sa crédibilité musicale. En véritable pionnier, il n’a pas hésité à aller au charbon lorsque le blues français n’en était encore qu’au stade embryonnaire pour les pseudo-intellos et les orthodoxes, afin que ce style ne soit plus pris pour une utopie. Au moment de la sortie chez Frémeaux & Associés de son nouvel album « Benoît Blue Boy en Amérique » (une perle !) et de quelques rééditions bienvenues, l’intéressé se place indubitablement en pole position sur l’échiquier du french blues. Pour Blues & Co, Benoît s’est penché sur son impressionnante discographie, riche patrimoine d’une passion, reflet d’une longue et fabuleuse histoire qui pourrait commencer par il était une fois Benoît…

Les légendes n’ont pas besoin d’être mortes pour exister !

 

1990 C.D « PARLEZ-VOUS FRANÇAIS ? » (LA LICHERE LLL 87)

 

Blues & Co : Premier C.D sur le label La Lichère.

Benoît Blue Boy : La Lichère est le label de Patrick Tandin. Je l’ai enregistré en banlieue à Puteaux avec Patrick Chevalot comme ingénieur du son. Sur cet album à la pochette très TEX-MEX il y a toujours les deux tortilleurs d’origine, et j’ai commencé à ajouter du monde car on voulait vraiment s’amuser en l’enregistrant. Il y a Geraint Watkins qui est vraiment le meilleur accordéoniste - pianiste anglais. Il a joué avec Clapton, les Stray Cats, Dave Edmunds, etc…et en ce moment je crois qu’il est le chef d’orchestre de Van Morrisson. Geraint est un type amusant car il adore Clifton Chénier, et il chante en faux français, comme les mecs qui ici chante en yaourt anglais, lui chante en yaourt français. Il y a aussi Bill Thomas qui venait juste d’arriver en France, un autre anglais à la basse qui s’appelle John Greaves, Claude Langlois à la steel guitar. Ce disque commençait à sonner Louisianais, car je pouvais enfin commencer à faire ce que j’avais envie. Le premier morceau par exemple « Elle rentre dedans » c’est vraiment du rock’n roll cajun. Il y a pas mal d’accordéon sur des titres comme « Louisiana » que The Duo a repris et chante toujours sur scène. Par contre, on a refait « Angéla » en trio, car ce titre montre beaucoup plus comment on jouait sur scène dans cette formation que l’album « B.B.B & Les Tortilleurs » qui est à mon avis trop sage par rapport à la musique qu’on jouait en trio. Les deux albums La Lichère viennent de ressortir chez Frémeaux & Associés sous leur pochette d’origine.   

 

1979 L.P « BENOÎT BLUE BOY » (VOGUE LD.8562)

 

Blues & Co : Alors Benoît, ton premier album est-ce celui d’un pionnier ?

Benoît Blue Boy : C’est le premier album de blues en français. Pour la petite histoire, on l’a enregistré deux fois. Je l’avais déjà enregistré en Bretagne en 1977, et quand on est revenu à Paris, le mec qui m’accompagnait a fait tomber les bandes dans le caniveau, alors je me suis dit que c’était mauvais signe, et je ne l’ai pas sorti. Entre temps, un directeur artistique de chez Vogue avait écouté deux ou trois trucs sur une cassette, ça lui avait plu, ce qui nous a permi de l’enregistrer une seconde fois. Mais tous les morceaux qui sont sur cet album, on les jouait déjà sur scène depuis trois ou quatre ans. Je n’ai pas galéré pour signer car c’était la mode des groupes de rock’n roll français comme Téléphone, Bijou. J’ai signé chez Vogue la même année que Paul Personne (Backstage) et Jacno. Aujourd’hui pour un jeune groupe qui veut jouer du blues pur comme je le fais c’est très difficile. Tu peux y arriver si tu le mélanges à la variété, comme De Palmas par exemple.

 

Blues & Co : Avec le recul, on s’aperçoit que plus de vingt piges après, des tas de personnes reprennent encore de nombreux titres qui le composent comme de véritables classiques du french blues !

Benoît Blue Boy : Oui, « Le blues de Laker », « Le blues au bout d’mon lit », « Descendre au café », ou encore récemment une nouvelle version de « J’marche doucement » sur le dernier album de Patrick Verbeke, etc…Mais il n’a toujours pas été réédité en C.D, alors il faut le chercher. De plus c’était la toute première pochette de Jean-Baptiste Mondino avec l’alcotest, qui par la suite en fera beaucoup d’autres. J’aime bien les vinyles et ça m’emmerderait de voir la pochette en tout petit, à moins de trouver un système pour que lorsqu’on la déplie elle devienne  aussi grande que le format des 33t.

 

 

1991 C.D « LE TORTILLAGE COMPILATION » (NEW ROSE RECORDS FC 086)

 

Blues & Co : Voici une compilation qui est devenu introuvable.

Benoît Blue Boy : Oui qui est sortie chez New Rose, qui réunit les deux albums Tortillage, et Benoît Blue Boy et les Tortilleurs, et qui j’espère devrait ressortir prochainement chez Frémeaux

 

 

 

      

1992 C.D « PLUS TARD DANS LA SOIREE » (LA LICHERE LLL 187)

 

Blues & Co : Plus tard dans la soirée, n’était-ce pas le nom de ton premier groupe ?

Benoît Blue Boy : Absolument ! Pour cet album on avait pris Jean-Marc Despeignes à la basse, qui est un mec super et qui a souvent joué avec la Mano Négra. J’aime les morceaux qui composent ce disque mais on ne l’a pas fini comme je l’aurai voulu. C’est peut-être l’album que j’aime le moins, car j’aurai voulu rajouter des tas de trucs. Quand je l’écoute, j’entends les trucs que j’aurai voulu mettre, du piano ici (rires !). Le morceau « Toujours du rock’n roll » est la musique du dernier film qu’ont tourné les Charlots. Il y a aussi « Jacques a dit » en hommage à Jacques de l’Utopia, « T’inquiète pas Benoît », « Sur tes traces », de supers morceaux malgré tout !

 

1980 L.P « ORIGINAL » (VOGUE 508617)

 

Blues & Co : Déjà le second album, à l’époque fallait-il en sortir un tous les ans ?

Benoît Blue Boy : Oui c’était comme ça. Tu signais un contrat de trois ans pour trois albums. A l’époque je me suis demandé si j’allais arriver à en faire un deuxième tout de suite, mais c’est là que je me suis aperçu que ce n’était pas compliqué d’écrire. Faut dire qu’à l’époque en faisait environ 200 gigs par an.

 

Blues & Co : On retrouve les même musiciens que sur le premier.

Benoît Blue Boy : Oui les mecs de Tours avec Didier Dupont à la guitare, Mitch à la batterie, avec un pianiste américain en plus Robb Finkel, il y a toujours Patrick Verbeke…On l’a enregistré dans les mêmes studios Vogue à Villetaneuse. Quant au style, je ne me rends pas compte, car pour moi c’est toujours la même chose. Sauf dans la manière de faire, mais pour moi ça reste du Benoît Blue Boy, avec un peu de Chicago, un peu de Louisiane…Tu vois, je ne fais pas trop la différence entre le premier et le dernier que je viens d’enregistrer à Austin (rires !) A l’époque on était assimilé à la famille du rock français. On faisait des festivals avec des groupes comme Little Bob Story ou Ganafoul. Dans la musique même il n’y avait pas de grosses différences entre ce que je faisais et ce que faisait Ti’Bob, etc. Entre temps, j’avais produit le deuxième album de Backstage, car Paul voulait quelqu’un en qui avoir confiance, car c’est très difficile en France de faire des albums de blues, et d’être des deux côtés à la fois. J’aime bien réaliser des albums, je l’ai fait pour Stocks, Patrick et Steve Verbeke, Lenny Lafargue, etc…Si tu n’es pas habitué aux studios tu perds vite une bonne partie de tes moyens.

 

1994 C.D « COUVERT DE BLEUS » (A B DISQUES 0365 2)

 

Blues & Co : Alors là, tu avais fait très fort, avec « Couvert de bleus », un collector à la pochette toute bleue.

Benoît Blue Boy : Je pense qu’il va aussi ressortir, car on est en train de le racheter. On l’avait sorti chez A.B, et hélas on avait fait une erreur. A.B était la boite de production de Dorothée, je ne sais pas pourquoi, mais ils voulaient absolument cet album et ils ont payé très cher pour l’avoir. C’est quand ils m’ont demandé de faire des télés les mercredis après-midi avec les Musclés que j’ai dit stop (rires !). Je l’ai fait pratiquement avec les musiciens qui jouent maintenant avec moi, Stan Noubard Pacha et Fabrice Millérioux. Fabrice voulait absolument devenir le batteur de blues en France et je savais que si j’avais un problème je pouvais faire appel à lui. Quant à Stan, j’ai fait le tour des clubs à Paris, et à cette époque, il n’était peut-être pas le meilleur, mais c’était celui qui était le plus intéressé par le blues. Aujourd’hui il est considéré par beaucoup comme le meilleur guitariste de blues français. On retrouve Geraint au piano et à l’accordéon, et il y a Franck Goldwasser (Paris Slim) qui joue de la guitare sur deux morceaux. Il y a des morceaux originaux comme « Idiot ou bien crétin », et pas mal d’anciens qu’on a remis au goût du jour car on les joue toujours sur scène et ils étaient devenus introuvables comme « Descendre au café », « Le p’tit nuage », « Le blues au bout d’mon lit », « J’vais appeler mon boulot » etc…C’est vraiment un bel album avec un son d’enfer qu’on a enregistré dans le studio de Patrick Chevalot du côté de Dreux. C’est là-bas que j’avais envoyé Doo The Doo enregistrer leur deuxième album.    

 

 

 

 

 

 

 

 

1981 45t « LE BLUES DU VENDEUR DE BLUES » (VOGUE 101495)

 

Blues & Co : On te retrouve en 81 avec ta dernière production chez Vogue. Pourquoi un 45t ?

Benoît Blue Boy : Ca c’est une histoire de maison de disques. Au départ tu signes avec un type puis le même type se barre dans une autre boite. Ce 45t sonne très rhythm & blues avec des cuivres sur « Le blues du vendeur de blues », et à l’origine le morceau « Catheline » durait plus de dix minutes, avec des cuivres, des cordes, ça sonnait très Nouvelle Orléans, et Vogue n’a gardé que trois petites minutes. Et comme ils ne savaient pas lequel des deux morceaux allait marcher, il n’y a pas de face B, il y a une face A et une face A’. En fin de compte les deux morceaux ont marché car c’était la grande époque des juke-boxes, et plusieurs orchestres de bal jouaient « Le blues du vendeur de blues », à cause des cuivres. A vrai dire ce 45t a coûté à Vogue autant de fric que si j’avais fait un album entier (rires !)

 

 

1997 C.D « LENT OU RAPIDE » (DIXIEFROG/MSI VDCD 116)

 

Blues & Co : Pourquoi avoir enregistré « Lent ou rapide » dans le sud-ouest ?

Benoît Blue Boy : On l’a enregistré à Marmande dans un très bon studio car ça arrangeait la maison de disques. Et comme j’aime bien cette région…Cette fois Thibault Chopin est entré dans le groupe, et j’avais de nouveau  invité Franck Goldwasser, qui nous a beaucoup aidé pour la réalisation des morceaux. C’était vraiment amusant de le faire avec lui, car c’est un grand spécialiste du blues et c’est important d’avoir une oreille extérieure qui connaisse bien le sujet. Il joue actuellement avec pas mal de musiciens du label Fedora. Dans ce disque il y a un morceau mineur « Barge et sans loi », un des rares morceaux qui ne fait pas du tout rire, et que j’avais composé au moment de la guerre dans l’ex-Yougoslavie, du siège de Sarajevo. J’avais trouvé ça d’une telle horreur, la neige, le sang, les massacres, la trahison. C’est vraiment très rare que je m’inspire de l’actualité pour écrire. Il y a aussi l’instrumental « Cricketer’s le retour » qui est bien sûr un hommage au club de Bordeaux. A chaque fois qu’il y avait des rumeurs de fermeture Philippe Combe m’appelait, c’est pourquoi j’ai mis « le retour ».

 

 

 

1982 L.P « PLAISIR SIMPLE » (GAUMONT MUSIQUE 753807)

 

Blues & Co : Troisième album et changement de maison de disques ?

Benoît Blue Boy : Oui c’était l’époque ou Jacques Dutronc était aussi chez Gaumont, j’ai fait deux ou trois trucs avec lui. Et c’est le premier disque que j’ai enregistré avec les niçois de Nighthawks, avec le regretté Willie Eckert qui était un excellent guitariste, Fred Dormoy à la basse, Charlie Malnuit à la batterie. C’est peut-être une plus grande incursion vers le côté Louisianais, avec des titres comme le très vaudou « C’est pas sorcier »…Au début c’était plus difficile de faire passer ce côté Louisiane car tout le monde pensait que le blues c’était du rock’n roll en français. Il y a toujours des morceaux que je joue sur scène comme « J’vais appeler mon boulot », et Steve Verbeke a repris « Le juge » sur son album.

 

   

 

2001 C.D : « BENOÎT BLUE BOY EN AMERIQUE » (FREMEAUX & ASS LLL 298)  

 

Blues & Co : On en arrive au petit dernier made in Austin Texas, un excellent album tout nouveau, tout chaud !

Benoît Blue Boy : Oui « Benoît Blue Boy en Amérique » on dirait un album de Tintin (rires !). Je suis parti l’enregistrer à Austin, j’avais envie de le faire depuis longtemps, mais qu’à partir du moment où je pouvais contrôler tout ce que je faisais. J’avais eu l’occasion d’enregistrer l’album « Parlez-vous français ? » à New-Orléans, mais j’avais refusé car ce n’était pas le moment, et je voulais le faire ici avec des français. Je connais bien les Etats-Unis, j’y ai fait de nombreux séjours pendant plus de dix ans, j’y ai joué, et je sais comment sont les musiciens américains, et que c’est évident qu’à part si tu les connais, si ce sont des potes à toi et que tu leur as prouvé que tu connais la musique aussi bien qu’eux, sinon mieux, tu ne vas pas rentrer dans un studio pour prouver à chaque mec que tu sais jouer.

 

 

Blues & Co : Tu signes toujours des textes en français teintés d’humour et de dérision ?

Benoît Blue Boy : Pour moi le blues n’est pas un truc pathétique. Tu ne joues pas le vendredi ou le samedi soir pour enfoncer les gens et les faire pleurer dans leur bière. Ils pleurent déjà assez comme ça la semaine. Non, le blues c’est comment se sortir des galères de tous les jours. Je chante en français car je trouve ça normal. Sinon tu te retrouves vite dans une situation de schizophrénie totale. Il m’arrive quelques fois de chanter en anglais avec des potes et de reprendre un truc de Lazy Lester ou de Little Walter mais ça reste un gag. Les jeunes groupes qui ne font aucun effort pour chanter en français sont dans un tel état schizo que j’espère qu’ils ne vont pas devenir fous (rires !). Si tous les groupes chantent en anglais, avec les quotas des radios, la SACEM, etc ils vont tourner en rond, c’est ridicule. Ce qui me gonflerait, c’est que le blues français devienne une pâle copie comme le rockabilly, avec toujours les mêmes morceaux, toujours la même attitude. Cependant il y a vraiment de très bonnes choses en France qui me branchent vraiment comme le dernier C.D de Raoul Ficel qui est super, tout comme l’album de Lenny Lafargue « L’estuaire », même si ils chantent en anglais j’aime bien Doo The Doo, mais en ce moment ils commencent à réfléchir sur le fait de chanter en anglais et pourquoi les médias n’ont pas plus parlé de leur dernier et excellent album « Hex », j’aime bien Steve Verbeke et en ce moment on prépare son deuxième album, j’aime bien Youssef Rémadna de Briançon qui est un super harmoniciste de blues qui joue vraiment dans l’esprit, quant à Bo Weavil ils vont tellement loin dans le côté roots que je comprends qu’ils chantent en anglais, et je vais les voir dés que je peux.

 

  

Blues & Co : Pourquoi avoir choisi Austin Texas ?  

Benoît Blue Boy : Parce que c’est l’endroit le plus central, où il y a encore énormément de musiciens qui viennent jouer, qui son nés à New-Orléans, qui sont nés à Port Arthur, qui sont nés à San Antonio, qui sont nés au Mexique, qui ont le même âge que moi, et qui jouent dans les clubs tous les soirs. Ils connaissent cette musique par cœur. Ceux qui jouent sur l’album, je les connaissais pratiquement tous. Il y a Hector Watt à la guitare qui est un musicien fabuleux, un mescalero d’El Paso qui a appris à jouer en regardant Jimmie Vaughan, il a joué avec Paul Orta, etc…Randy Garibay pour le côté mexicain. Je tenais absolument à l’avoir sur l’album car Randy est le chanteur chicano du Texas. Tu prends les cuivres Rocky Morales au sax et Al Gomez Jr à la trompette, ce sont des mecs qui jouent dans les groupes de rhythm & blues depuis l’âge de douze ou treize ans. Ils sont fantastiques car ils font un mélange de mariachis et de cuivres New-Orléans. Il y a aussi mon ami « Unk » John Turner à la batterie qui a joué avec Johnny Winter, Mark Goodwin au piano, et il y a un français mon pote « Pitou » Pellegrin à la basse, qui habite Austin depuis des années et qui a appris à jouer en regardant Keith Ferguson. On m’a tout de suite proposé la section rythmique de Stevie Ray Vaughan mais je ne voyais pas l’intérêt. Je joue de la guitare rythmique sur un morceau qui s’appelle « Hey ! toi », qui est une sorte d’hommage à Lazy Lester, à Slim Harpo, ça sonne très Louisianais. Et j’ai repris un vieux morceau que je jouais en trio qui s’appelle « Tous les jours » dans une version moins speedée. C’est à dire que les morceaux sont un peu lents, car à l’extérieur du studio, il faisait quand même 52°, et qu’à chaque fois qu’on enregistrait il fallait arrêter l’air conditionné et les ventilateurs à cause du bruit. Pas besoin de te préciser que la bière glacée coulait à flots (rires !).

 

 

1983 L.P « WEEK-END A NICE» (BLACK’N’WHITE MUSIC BWM 001)

 

Blues & Co : On te retrouve avec un titre sur une compilation intitulée « Week-end à Nice ».

Benoît Blue Boy : Oui c’était l’époque où j’habitais à Villefranche sur Mer. Après les Chats Sauvages dans les années soixantes, cette compil’ regroupe tous les groupes du moment. Les Bandits, Les Nighthawks, Les Playboys, etc…J’ai enregistré « Changer d’avis » en duo avec Diana la sœur de Willie Eckert. On peut encore le trouver à Nice au magasin Black’n’White, ou sur internet. Je me sentais vraiment niçois, j’avais presque l’accent (rires !)  

 

Blues & Co : Comment qualifies-tu cet album ?

Benoît Blue Boy : C’est la musique que j’écoutais quand j’étais gamin, quand j’allais dans les surprises parties et que j’écoutais Jimmy Reed et Fats Domino. C’est la musique qui inondait tout le Golfe du Mexique fin 1950 début 1960. Tu prends le morceau « T’es la seule », c’est le truc typique du rhythm & blues Louisianais très lent du début des 60’s, qui était joué dans les bals de Port Arthur, de New-Orléans, au Mexique , et qui était très proche de ce que faisaient Fats Domino, Joe Barry ou Freddy Fender au Mexique. Ca doit faire traîner les pieds. En résumé c’est la musique qu’on écoutait, même en France car il y avait beaucoup de bases américaines, avant l’arrivée des Beatles. Une fois que les Beatles sont arrivés, la musique a changé. En bien ou en mal je ne sais pas (rires !). Mais fort heureusement la musique n’a pas beaucoup bougé en Louisiane ou au Texas. J’ai mis un peu de temps pour le sortir car les maisons de disques ne comprenaient pas bien ce qu’il y avait dans l’album (rires !). Heureusement Patrick Frémeaux l’a trouvé super. Je voulais un label qui soit intéressé, car d’autres voulaient le sortir, mais plus parce que c’était moi qu’autre chose. Pourtant c’est vraiment du Benoît Blue Boy, mais comme je rentrais d’Austin, tout le monde s’attendait à un truc avec des tonnes de guitare. Mais aucun de mes albums ne contient des tonnes de guitare. Même sur « Lent ou rapide », il y a Stan et Paris Slim qui jouent dessus, mais c’est tout le temps mélangé, tu ne sais pas qui est devant, j’aime ce mélange de guitare comme tu peux l’entendre sur les albums de Muddy Waters ou Jimmy Reed. Pour moi les meilleurs guitaristes de blues du monde sont des mecs qui jouent très simplement comme Jimmie Vaughan, ou même Keith Richards. C'est peut-être parce que je chante et je joue de l’harmo, mais je joue quand même de la guitare, mais pas sur scène, sur disque simplement. Les guitar- heroes qui se branlent sur scène avec une guitare et balancent des déluges de notes je trouve que c’est une horreur (rires !) Pour moi c’est l’album le plus roots que j’ai enregistré. Tu vois, il y un phénomène avec plein de groupes en France qui jouent très roots, il y a un retour aux sources, quand tu les écoutes c’est Memphis des 50’s, c’est Howlin’Wolf. Je pense à Bo Weavil, à Doo The Doo, même si ce n’est pas les mêmes racines, car j’ai 55 balais, on a pas écouté les mêmes disques quand on était gamins, et pour moi la musique roots c’est vraiment l’album que je viens de faire à Austin.

 

1986 L.P « TORTILLAGE » (MADRIGAL MAD 5019)

 

Blues & Co : Après il y a eu quelques années de silence discographique, pourquoi ?

Benoît Blue Boy : C’est là que tu t’aperçois que c’est très difficile pour un groupe de province, car si tu n’es pas dans Paris, on a l’impression que tu n’existes plus. Et pourtant on faisait toujours plus de 200 dates par an. A l’époque ce n’était pas compliqué de tourner même si tu n’avais pas un disque récent dans les bacs. J’ai enregistré cet album à Paris avec les Nighthawks. On y retrouve quelques invités comme Zachary Richard à l’accordéon cajun, Manu Galvin, Patrick Verbeke, ou encore Guillaume Petite au piano. Encore des titres qu’on joue toujours sur scène comme « Combien »,  « Le p’tit nuage », « Oh ! Oh ! Lucie ». C’est rare qu’on joue un album entier sur scène, même quand il y en a un qui sort, on choisit toujours cinq ou six morceaux qu’on mélange au répertoire avec d’anciens titres. Et c’est là que le mot « Tortillage » apparaît pour la première fois.

 

Blues & Co : Sur la pochette, tu poses en super costard de mafioso rital, avec le chapeau !

Benoît Blue Boy : Il s’agit de superbes clichés de Marie-Françoise Prybys qui est un grand photographe de mode. D’ailleurs ce costard on me l’a volé en Italie (rires !).    

 

Blues & Co : Quels sont tes projets ?

Benoît Blue Boy : Là avec les Tortilleurs, on vient de terminer une tournée européenne d’un mois avec Big Bill Morganfield, alors je crois bien que je vais dormir pendant deux semaines (rires !) Je ne sais pas comment l’album va être accueilli car c’est un truc tellement atypique, mais comme il est tellement atypique, il peut plaire beaucoup plus que les autres qui étaient dans la même lignée. Mais ça reste un album de blues français, bien que je tenais à l’enregistrer au Texas, avec des musiciens qui ont mon âge, et qui ont écouté les mêmes choses que moi. Je pense faire venir les américains pour les festivals cet été, et pour une grande date à Paris à la rentrée, soit à la Maroquinerie, ou au New Morning. Et je suis très content de la réédition chez Frémeaux de la plupart de mes anciens albums !    

 

 

1988 L.P « BENOÎT BLUE BOY & LES TORTILLEURS » (MD 85061)

 

Blues & Co : 1988 début des Tortilleurs !

Benoît Blue Boy : Les Tortilleurs ça veut dire les twisteurs, car en Louisiane le twist s’appelle le tortillage. A ce moment il y avait une espèce de déclin des groupes de rock ou de blues, tout le monde chantait en duo, et moi le duo ça me gonflait, à part avec Patrick. Mais jouer dans les bars moins fort que les gens qui parlent ça m’a toujours cassé les pieds (rires !). Donc j’avais monté ce groupe en trio, sans basse, avec François Bodin à la guitare, et Philippe Floris à la batterie. Ca nous permettait de nous déplacer facilement avec la batterie et les deux petits amplis dans la voiture, et de jouer dans tous les bars et les festivals. On jouait vraiment vite et fort façon Hound Dog Taylor tel un commando ! Le trio c’était vraiment une époque superbe. C’est à ce moment qu’on a commencé à écumer l’Italie. C’était la folie, sur scène il n’y avait plus aucun contrôle, plus aucun système musical, et tu pouvais rester sur un accord le temps que tu voulais, rallonger les morceaux. Malheureusement, je pense qu’on a enregistré cet album un peu trop tôt, car on était plus à l’aise quelques années après.

 

          

 Blues & Co : Merci à Benoît Blue Boy pour ce voyage à travers le temps, à travers son épopée, à travers le blues dont il demeure et demeurera encore longtemps l’un des principaux artisans. T’es le seul, oui t’es le seul…

 

Discographie réalisée à Paris le 2 mai 2001 par Serge Sciboz

Photos : Philippe Combe

 

menu - accueil